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Billet 2018-03 : Actualités santé. Focus
le 16 septembre 2018
La télémédecine entre enfin dans le droit commun, les suites (mais pas la fin) de l’affaire du Lévothyrox, et plus.

15 septembre 2018 : la télémédecine entre enfin dans le droit commun...

Appelée à être, comme elle l’est déjà ailleurs, l’un des modes privilégiés de délivrance des diagnostics et à terme des soins, la télémédecine ne s’inscrit que laborieusement dans les pratiques. La faute doit en être imputée à la lenteur d’un processus juridique précautionneux et prudent qui, lancé en 2009 avec l’entrée de la télémédecine dans la loi, n’aboutit réellement que maintenant au terme d’années d’interrogations et de bilans mitigés.

 

Au regard des contraintes organisationnelles et financières inhérentes au procédé, les pouvoirs publics ont en la matière fait le choix d’un accompagnement serré. Celui-ci s’est d’abord traduit par un cadre légal et réglementaire définissant la télémédecine comme « une forme de pratique médicale à distance utilisant les technologies de l'information et de la communication » (article 78 de la loi n°2009-879 du 21 juillet 2009, article L.6316-1 CSP) et énumérant les actes médicaux en relevant : la téléconsultation, la téléexpertise, la télésurveillance, la téléassistance médicale et la régulation médicale (décret n° 2010-1229 du 19 octobre 2010). La concrétisation a pris la forme d’un programme d’expérimentation, le programme ETAPES (Expérimentations de télémédecine pour l’amélioration des parcours en santé, LFSS 2014), dans le but tout à la fois de développer les activités de télémédecine, de définir un cadre juridique adapté et de « fixer une tarification préfiguratrice des actes permettant aux professionnels de santé de développer des projets cohérents et pertinents, en réponse aux besoins de santé et à l’offre de soins régionale ».

Quatre années d’expérimentations ont permis de révéler les intérêts et les écueils de la pratique pour les patients et les professionnels de santé ainsi que les transformations institutionnelles que son développement suppose. Le basculement dans le droit commun était donc envisageable du moins pour une partie de la télémédecine afin de permettre à la France de rattraper son retard par rapport aux pratiques des autres pays en ce domaine.

 

Voilà qui est donc fait depuis la loi de financement de la sécurité sociale (LFSS) pour 2018, pour la téléconsultation et la téléexpertise qui vont pouvoir être utilisées si ce n’est quasiment en routine, du moins sans obstacle : les actes relèvent désormais du droit commun du remboursement par l’assurance-maladie au même titre que toute autre prestation médicale, ce qui doit en favoriser et valoriser la pratique. Pour que ce choix devienne effectif, le législateur laissait aux partenaires conventionnels (assurance maladie et syndicats professionnels) le soin de négocier les modalités de mise en œuvre et les et les tarifs applicables. Les négociations débutées dès janvier 2018, ont abouti en juin avec la signature les 13 et 14 juin de l'avenant n°6 à la convention médicale encadrant la télémédecine, par quatre syndicats représentant la majorité des médecins libéraux. La Fédération des médecins de France (FMF) les a rejoints le 27 juin. Cette signature marque la fin des expérimentations de financement des actes de téléconsultation et de télé-expertise et le basculement de la prise en charge dans un financement de droit commun. La télésurveillance reste en revanche financée de façon expérimentale pendant quatre ans.

 

Le dispositif est fixé dans l’arrêté du 1er août 2018 portant approbation de l'avenant n° 6 à la convention nationale organisant les rapports entre les médecins libéraux et l'assurance maladie signée le 25 août 2016 (JORF n°0183 du 10 août 2018).

- Le remboursement de la télé consultation est applicable dès le 15 septembre sur la base des mêmes principes qu'une consultation classique : tarification de 25 et 30 euros selon les cas, prise en charge répartie entre l'assurance maladie et la complémentaire (70 %/30 %), tiers payant appliqué selon la situation du patient, et prise en charge intégrale pour les patients en affection longue durée (ALD), la maternité, les bénéficiaires de la CMU-C (couverture maladie universelle complémentaire) et de l'aide à l'acquisition d'une complémentaire santé (ACS). Chacun pourra de recourir à ce type de consultation, mais toujours dans le cadre du parcours de soins coordonné et à l’appréciation du médecin et sous sa responsabilité : il est le seul à juger de la pertinence du recours à la téléconsultation. La téléconsultation doit donc passer par le médecin traitant du patient sauf pour les spécialistes que l’on peut déjà consulter en accès direct et pour les patients de moins de 16 ans. L’arrêté prévoit aussi que l’exigence de respect du parcours de soins coordonné ne s’applique pas aux patients qui ne disposent pas de médecin traitant désigné ou dont le médecin traitant n’est pas disponible dans le délai compatible avec leur état de santé.

Les droits du patient propres à la relation médicale demeurent inchangés ce qui a conduit à sécuriser à divers niveaux les aspects techniques. Ce respect impose d’abord le recours à un échange par vidéotransmission, et dans des conditions d’équipement, d’accompagnement et d’organisation adaptées aux situations cliniques des patients afin de garantir la réalisation d’une consultation de qualité ; il passe aussi par une connexion sécurisée, afin de préserver le secret professionnel et garantir notamment la sécurisation des données transmises (confidentialité, protection des données personnelles, etc.) et la traçabilité de la facturation des actes réalisés. Pour les patients qui n’ont pas internet ou qui ne le pratiquent pas ou mal, il est prévu qu’ils puissent être assistés d'un autre professionnel de santé équipé, « comme un pharmacien ou une infirmière venant à domicile » ou se rendre, sur conseil de leur médecin, dans une cabine de téléconsultation installée à proximité. Dans tous les cas, le patient, après information, devra donner son consentement à une telle prise en charge.

- La téléexpertise permet à un médecin (requérant) de consulter à distance un confrère (requis) sur le cas d'un patient, en disposant des données médicales utiles (clichés, tracés, analyses). Si elle est usuellement pratiquée dans le quotidien par la moitié des médecins libéraux, de façon informelle, elle sera désormais tracée et rémunérée, ce qui constitue une des grandes nouveautés de l’accord. Le recours à la téléexpertise est apprécié au cas par cas par le médecin requérant et l’opportunité de sa réalisation relève de la responsabilité du médecin requis.

Les actes en seront remboursés à partir de février 2019 pour certaines populations : les ALD, les maladies rares, les patients résidant en zones "sous-denses" et qui ont une difficulté d'accès à un médecin traitant, les résidents d'établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad) et de structures médico-sociales et les détenus, avant d’être généralisé en 2020. Comme pour tout acte de télémédecine, le médecin informera le patient afin de recueillir son consentement. Deux niveaux d’expertise sont prévus selon la complexité du dossier du patient et le nombre de documents à examiner (Exemples de téléexpertise de niveau 1 : interprétation d’une photographie de tympan, ou de pathologie amygdalienne ; lecture d’une rétinographie ou de photos pour une lésion cutanée, pour le suivi d’une plaie chronique d’évolution favorable ; surveillance cancérologique simple selon les référentiels. Exemples de niveau 2 : surveillance en cancérologie dans le cadre de la suspicion d’une évolution ; suivi d’une plaie chronique en état d’aggravation ; adaptation d’un traitement anti épileptique ; bilan pré chimiothérapie, lors de son initiation). En regard, sont fixés deux niveaux de tarifs, de 12 euros (niveau 1) à 20 euros (niveau 2) pour le médecin sollicité. Dans les mêmes configurations, le médecin requérant est également rémunéré par l’Assurance Maladie car il favorise la coordination des soins autour du patient, de 5 € à 10 € par télé-expertise (dans la limite de 500 € par an).

Les garanties prévues pour la téléconsultation valent pour la téléexpertise avec une précaution spécifique : les échanges entre le médecin requérant et le médecin requis doivent passer par une messagerie sécurisée de santé. Et dans l’un et l’autre cas, un compte-rendu doit être intégré dans le dossier patient ou le DMP, s’il est ouvert. Autre point réglé par l’arrêté du 1er août, une aide forfaitaire a été négociée pour permettre aux médecins de s’équiper en matériels nécessaires (appareils médicaux connectés et abonnements à un service sécurisé de téléconsultation).

S’agissant des modalités techniques, le décret n° 2018-788 du 13 septembre 2018 relatif aux modalités de mise en œuvre des activités de télémédecine ouvre la possibilité aux professionnels de santé qui facturent des actes de télémédecine et qui se trouvent à distance du patient de pouvoir déroger aux dispositions de l'article R. 161-43 du code de la sécurité sociale prévoyant la signature des feuilles de soins, qu'elles soient électroniques ou sur support papier, par l'assuré. Il abroge dans le même mouvement les dispositions R. 6316-6, R. 6316-7 et R. 6316-8 du code de la santé publique relatives à la contractualisation avec les ARS et au conventionnement entre acteurs, ce qui va alléger les formalités préalables pour la mise en œuvre des actes de télémédecine.

Dans ce cadre, le ministère des Solidarités et de la Santé a saisi la HAS pour « définir les situations cliniques, les champs et les publics pour lesquels les actes de téléconsultation et de téléexpertise devraient être exclus ». Après une analyse de la littérature internationale et la consultation des parties prenantes, la HAS prend position en faveur du déploiement de la pratique sur le territoire et de l’appropriation de cette pratique par tous les professionnels de santé concernés : elle conclut qu’aucune situation clinique ne peut être exclue a priori d’un recours à la téléconsultation ou à la téléexpertise mais qu’il importe de définir en amont de la réalisation d’un acte de téléconsultation et de téléexpertise des critères d’éligibilité au cas par cas. Ce travail doit donc être complété en fin d’année par un guide sur le bon usage et la qualité de ces pratiques cliniques, avec un volet spécifique sur les examens d’imagerie médicale. (Fiche mémo Qualité et sécurité des actes de téléconsultation et de téléexpertise - Avril 2018 ; Rapport d'élaboration de la fiche mémo téléconsultation téléexpertise - Avril 2018).

Le 28 août, une décision de l'Union nationale des caisses d'assurance maladie (Uncam) a précisé les actes et prestations pris en charge par l'assurance maladie.

Notons sans surprise que sont exclus d’une telle prise en charge les actes médicaux réalisés via des plateformes commerciales dite de téléconseil. Simplement, s'il s'agit d'un service de téléconsultation proposé par une mutuelle ou un assureur partenaires, il est alors offert et assuré par ces derniers à leurs adhérents. A cet égard, comme le rappelait la Société française de télémédecine en 2015, le téléconseil médical personnalisé proposé par les organismes complémentaires santé ou les assureurs, s’il permet de répondre à une demande, doit être différencié de la téléconsultation. Et de rappeler que « faute d'être assimilé à une téléconsultation, le téléconseil médical personnalisé ne doit pas permettre aux médecins qui le pratiquent d'être rémunérés à l'acte », ajoutant « que la responsabilité des médecins pratiquants "doit être couverte par l'organisateur du service de télémédecine", comme le sont les médecins du centre 15 qui sont couverts par l'assureur du centre hospitalier dont ils sont salariés ».

 

A retenir également

- Publication de l’arrêté du 11 juin 2018 portant approbation du référentiel d'accréditation des organismes de certification et du référentiel de certification pour l'hébergement de données de santé à caractère personnel (JORF n°0148 du 29 juin 2018,) qui va permettre l'entrée en vigueur de la nouvelle procédure de certification des hébergeurs. On se rappelle que le régime d'agrément des hébergeurs de données de santé (HDS) a été remplacé par une procédure de certification, prévue par le décret n°2018-137 du 26 février 2018 relatif à l'hébergement de données de santé à caractère personnel. Ce décret a été pris en application de la loi du 26 janvier 2016 de modernisation de notre système de santé et de l'ordonnance du 12 janvier 2017 relative à l'hébergement des données de santé à caractère personnel.

- De son côté, dans une décision rendue le 12 juillet 2018, le Conseil d'Etat a définitivement annulé l'obligation de certification des logiciels d'aide à la prescription (LAP), en censurant partiellement les dispositions du décret du 14 novembre 2014, qui avait fixé les modalités de l'obligation de certification des logiciels d'aide à la dispensation (LAD) et des LAP. (Conseil d'Etat, 12 juillet 2018, décision n°387156)

Alors que le recours au numérique est devenu le quotidien des praticiens et des patients, se pose avec acuité la question de la garantie des logiciels, objets connectés et autres applications, qu’ils soient ou non dispositifs médicaux. Lorsqu’ils sont reconnus dispositifs médicaux, le marquage CE permet d’en assurer la qualité et la sécurité, sans autre vérification ni procédure de certification supplémentaire. Or la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) a récemment estimé que les logiciels d’aide à la prescription (et certainement les logiciels d’aide à la dispensation), constituent des dispositifs médicaux au sens du droit de l'UE (CJUE, 7 décembre 2017, Snitem et Philips France, C-329/16). La Cour précise à cet égard en s’appuyant sur la finalité poursuivie, qu’un logiciel en lui-même est un dispositif médical dès lors qu’il est spécifiquement destiné par le fabricant à être utilisé dans un ou plusieurs des buts médicaux figurant dans la définition d’un dispositif médical, ce qui est le cas d’un logiciel dont l’une des fonctionnalités permet l’exploitation de données propres à un patient, en vue de détecter des contre-indications, des interactions médicamenteuses et des posologies excessives. Peu importe à cet égard qu’il n’agisse pas directement sur le corps ou dans le corps humain. De ce fait, il doit, pour être commercialisé dans l’Union, être marqué CE sans avoir besoin d’une autre certification à l’instar de celle prévue à l'article L. 161-38 du code de la sécurité sociale dans le but d’améliorer la prise en charge des stratégies thérapeutiques et organisée pour les logiciels médicaux sous l'égide de la Haute autorité de santé.

Il restait au Conseil d’Etat à se prononcer sur la compatibilité de ce régime de certification supplémentaire avec le droit de l’Union. Le juge administratif tire les conséquences de l'arrêt du 7 décembre 2017 de la CJUE, en soulignant qu’il résulte de l'interprétation donnée par la Cour de justice « que des logiciels d'aide à la prescription médicale constituent, pour celles de leurs fonctionnalités qui permettent l'exploitation de données propres à un patient à des fins mentionnées à l'article 1er, paragraphe 2 de la directive du 14 juin 1993, des dispositifs médicaux au sens de cette directive. Ils doivent, dès lors, en vertu de l'article 17, paragraphe 1, de la même directive, porter le marquage CE de conformité lors de leur mise sur le marché » ; dès lors que ce marquage a été obtenu, « ils peuvent, pour ce qui est de ces fonctionnalités, être mis sur le marché et circuler librement dans l'Union européenne sans devoir faire l'objet d'aucune autre procédure supplémentaire, telle une nouvelle certification ». Le marquage CE suffit donc. En conséquence, au vu de l’analyse de la CJUE , « en prévoyant une certification obligatoire des logiciels d'aide à la prescription médicale selon une procédure établie par la Haute Autorité de santé, quelles que soient leurs fonctionnalités », la certification obligatoire des LAP prévue par l'article L161-38 du code de la sécurité sociale, issue de la loi Bertrand, est contraire au droit de l'UE, sans être par ailleurs « justifiées au regard ni de l'article 8 de la directive, prévoyant une clause de sauvegarde, ni de son article 14 ter, relatif aux mesures particulières de veille sanitaire ». Dès lors, les dispositions du décret attaqué sont, dans cette mesure, dépourvues de base légale.

Dans un communiqué publié le 18 juillet, la HAS a dit « prendre acte » de cette décision, tout en rappelant que la certification HAS restait possible « sur la base du volontariat ».

- Les suites (mais pas la fin) de l’affaire du Lévothyrox

Conseil d'État, 26 juillet 2018, M. C... et autres, n° 422237 : plusieurs patients souffrant des effets indésirables de la nouvelle formule du « Levothyrox », fabriqué et commercialisé par les laboratoires Merck, ont demandé au juge du référé liberté du tribunal administratif de Paris de prendre toute mesure afin d’obtenir de garantir, de manière pérenne et en quantité suffisante, la fabrication, le stockage et la distribution sur le territoire national de l’ancienne formule du Lévothyrox. Le juge des référés du tribunal administratif de Paris ayant rejeté cette demande par une ordonnance du 3 juillet 2018, ces patients ont saisi le juge des référés du Conseil d’État en appel afin qu’il procède à un nouvel examen de l’affaire.

Le 26 juillet, le Conseil d’État rejette leur requête, en reprenant les conditions propres au référé. Le juge relève que le laboratoire Merck s’est engagé « à fabriquer, importer et mettre à disposition la spécialité Euthyrox en France jusqu’à la fin de l’année 2018 » et que « succédant aux autorisations délivrées depuis le mois de septembre 2017, une nouvelle autorisation d’une durée de trois mois a été accordée au laboratoire Merck Serono le 10 juillet dernier pour l’importation d’environ 173 000 boites d’Euthyrox de 100 comprimés conditionnées dans les dosages de 25 à 200 microgrammes ». En conséquence, « il n’est pas établi que ces quantités, auxquelles s’ajoutent les stocks issus des précédentes importations, ne seraient pas suffisantes pour éviter à très bref délai une pénurie et garantir aux requérants comme aux autres patients intéressés des dosages conformes à leurs prescriptions médicales ». Par ailleurs, si l’arrêt de la fabrication de l’ancienne formule est acté, pour l’ensemble de l’Europe, il « devrait être progressif, rendant ainsi le cas échéant envisageable, la poursuite d’importations en France au-delà du 31 décembre 2018 ». Pour ces raisons la condition d’urgence n’est pas remplie.

Il juge en parallèle qu’aucune carence caractérisée ne peut être reprochée aux autorités compétentes dans l’exercice de leurs pouvoirs : en effet, elles ont, « depuis l’apparition des effets indésirables et des intolérances liés à la nouvelle formule du Levothyrox », engagé plusieurs enquêtes de pharmaco-vigilance, maintenu la possibilité d’un approvisionnement de l’ancienne formule, « renforcé l’information des professionnels de santé et permis l’augmentation et la diversification des médicaments à base de lévothyroxine substituables à l’ancienne spécialité », autant de dispositions par ailleurs relayées dans le public. Enfin, les multiples demandes présentées tendant à obtenir que soient maintenues de façon pérenne la production ou la commercialisation en France de l’ancienne formule du Lévothyrox , « ont pour objectif des mesures d’ordre structurel reposant sur des choix de politique publique », impossibles à mettre en œuvre et faire effet rapidement: elles ne sont donc pas au nombre des mesures d’urgence que peut ordonner le juge des référés statuant sur le fondement de l’article L. 521-2 du code de justice administrative. La requête est donc rejetée.

- Nouvelle étape dans la saga du dossier médical, celle de la généralisation du DMP, portée par l'assurance maladie. Selon la direction de la Caisse nationale d'assurance maladie (Cnam), « plus de 500.000 » dossiers médicaux partagés (DMP) ont été créés dans les neuf territoires pilotes en un an, ces territoires pilotes, concernés par la phase d'expérimentation du DMP initiée en janvier 2017, étant le Bas-Rhin, Bayonne (Pyrénées-Atlantiques), les Côtes-d'Armor, le Doubs, la Haute-Garonne, l'Indre-et-Loire, le Puy-de-Dôme, la Somme et le Val-de-Marne. La généralisation du DMP sur l’ensemble du territoire et des patients doit être lancée au cours du mois d’octobre, comme l’a confirmé Agnès Buzyn le 3 septembre.

- Rapport remis le 3 septembre 2018, sur l’amélioration de l’information des usagers et des professionnels de santé sur le médicament. Mission présidée par Dr Gérald Kierzek et Magali Leo.

Ce rapport issu de la « mission information et médicament » mise en place en décembre dernier, formule, à la suite des errements et lacunes d’informations lors de la commercialisation de la nouvelle formule du Lévothyrox, toute une série de recommandations pour améliorer les informations liées à l'utilisation des médicaments. Alors que les actions en justice suivent leur cours, la mission a mis l’accent sur l’existence de « nombreuses difficultés de communication avec des patients et des professionnels de santé, manifestement mal informés de la décision relative au changement de formule de ce médicament et de sa mise en œuvre ». Plus précisément, elle relève :

- L’absence d’anticipation et d’accompagnement du risque malgré le contexte (caractéristiques inhérentes au produit à marge thérapeutique étroite, monopole du laboratoire, précédents comme la crise des génériques en 2009, expériences étrangères du changement de formule) et grand nombre de patients concernés) ;

- L’absence de réaction face aux nombreux signaux d’alerte singulièrement sur internet ;

- « Le ‘biais techniciste’ de l’information, qui s’est limitée à insister sur la légitimité scientifique du changement de formule (meilleure stabilité) et a largement occulté les besoins d’accompagnement des patients », et a même conduit à dénier toute pertinence aux remontées des patients ;

- La forme du message adressé aux professionnels lors de la mise sur le marché de la nouvelle formule, qui a prêté à confusion, le message sanitaire étant occulté par une d’information à caractère promotionnel ;

- Une communication tardive sur le produit suivie d’une communication de crise « artisanale » et brouillonne « avec l’impression générale d’une rétention d’informations (étude de bioéquivalence), des revirements et des démentis » ;

- Enfin, ce qui a sans doute fait basculer l’opinion, une « minimisation du ressenti des patients et de la légitimité de leurs signalements »: l’effet nocebo comme des réactions psycho somatiques ont été opposés aux plaintes des malades sans autre explication et sans réel questionnement sur les arguments pourtant nourris de leur « savoir expérientiel ».

Le rapport formule alors diverses propositions autour de quatre objectifs : diffuser chez les patients et les professionnels de santé une culture du médicament ; renforcer la transparence de l’information ; améliorer l’information tout au long de la vie d’un produit ; mieux anticiper et traiter les alertes relatives à un médicament.

Le 3 septembre, la ministre en charge de la santé s‘est engagée « pour une information plus accessible, plus claire et plus réactive sur le médicament » et a annoncé plusieurs mesures pour mieux informer sur les médicaments, parmi lesquelles :

- la mise en place d’une source unique d’information publique sur le médicament en s’appuyant sur Santé.fr, un site encore mal connu et trop peu utilisé ;

- l’amélioration de la coordination des soins entre les prescripteurs et les pharmacies d’officine par un renforcement de l’information du public sur l’existence et l’intérêt des dossiers santé dématérialisés (dossier pharmaceutique, DMP) ;

- la gestion de la communication d’urgence en cas d’alerte par l’ANSM (qui est pourtant passée à côté de la crise du Lévothyrox…) ainsi qu’une mobilisation rapide des professionnels, y compris libéraux ;

- le recours plus fréquent aux remontées d’information de patients et de professionnels de santé par l’élaboration dès 2018 d’une « stratégie de promotion de la déclaration des événements indésirables et le développement des technologies permettant de repérer des signaux faibles d’alerte en dehors du système de pharmacovigilance » ;

- les moyens s’assurer « une mobilisation rapide des professionnels de santé en cas d’alerte en étendant progressivement l’outil d’alerte DGS-Urgent à l’ensemble des professionnels de santé exerçant dans le secteur libéral » ;

- et enfin, disposition qui n’est pas la moindre tant elle bouscule la tradition de secret en matière de fixation des prix des produits de santé, l’engagement d‘assurer une représentation des usagers au sein du Comité économique des produits de santé, ce qui était demandé depuis longtemps par les associations et qui doit renforcer la transparence de l’information.

 

 

Isabelle Poirot-Mazères

15 septembre 2018

 

 

 



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