Santé publique : l’apport des sciences humaines et sociales
Plusieurs expertises conjuguées sont seules capables de résoudre les défis actuels de santé. À Toulouse, un institut « Santé-Société » promeut ces collaborations. Interview d’Isabelle Poirot-Mazères, sa directrice adjointe.
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Comprendre pour entreprendre : Pouvez-vous nous présenter l’Institut fédératif d’études et de recherches interdisciplinaires santé-société (IFRERISS), que vous co-dirigez ?

Isabelle Poirot-Mazères : L’IFERISS a été fondé en 2009 par Thierry Lang, un épidémiologiste, professeur de santé publique, avec l’objectif de promouvoir les recherches interdisciplinaires. Il rassemble des chercheurs d’horizons variés qui observent comment se construit la santé des personnes, afin de proposer des pistes de réflexion aux organismes locaux décisionnaires tels que l’Agence régionale de santé ou la Caisse primaire d’assurance maladie.
L’Institut est placé sous la tutelle des trois universités toulousaines et fonctionne avec le soutien de l’INSERM et du CNRS.

Quel est l’intérêt de cette approche pluridisciplinaire ?

De multiples déterminants sociaux, économiques et culturels orientent les individus, façonnent leurs parcours de soins et leur rapport à la santé, à tous les âges de la vie. Les inégalités en matière de morbidité et de longévité sont considérables. Les Français les plus favorisés ont 13 années d’espérance de vie en plus que le plus modestes. Croiser les disciplines au sein de l’IFERISS nous permet de cerner les déterminants de la santé, de voir comment se façonnent les inégalités et de proposer des modalités d’action pour les limiter.

Qui sont les porteurs de projets ?

La plupart du temps des sociologues, des psychologues, des scientifiques (épidémiologistes, biostatisticiens, nano-physiciens…) sont les porteurs des projets. Les chercheurs de l’Université Toulouse Capitole - juristes, informaticiens et mathématiciens- interviennent en appui. Petit à petit, le spectre de nos travaux s’est élargi vers des thématiques en lien avec le Big Data, les transformations de la relation de soin, l’impact de l’urbanisme sur la santé...

Quelques exemples de travaux en cours dans lesquels les chercheurs d’UT Capitole interviennent ?

Une proposition de l’IFERISS vient d’être retenue lors d’un appel d’offres lancé par l’Agence d’urbanisme de Toulouse. Il s’agit de concevoir un programme de formation pour sensibiliser les techniciens de l’aménagement urbain aux conséquences sur la santé des décisions prises en matière d’urbanisme. Placer un espace vert à tel ou tel endroit. Multiplier ou non le nombre des pistes cyclables. Localiser ou non une industrie dans tel quartier... Les chercheurs de l’Institut des Études Juridiques de l’Urbanisme, de la Construction et de l’environnement (IEJUC) travailleront sur ce projet, avec un intérêt tout particulier porté aux conditions d’émergence des inégalités sociales de santé.

Nous venons aussi d’être retenus pour travailler sur un projet qui concerne les données massives des registres des cancers d’Occitanie. Les compétences en droit du numérique seront indispensables. L’Institut de Mathématique de Toulouse va, quant à lui, étudier les conditions de production et d’assemblage de ces données.

Les chercheurs en sciences sociales de l’Université Toulouse Capitole sont-ils également impliqués dans la conception des politiques de lutte contre la pandémie ?

Nous participons au projet EPIDEMIC porté par l’épidémiologiste Michelle Kelly-Irving et soutenu par l’Agence Nationale de la Recherche. Il s’agit d’observer les déterminants sociaux de l’épidémie et les conséquences sociales et psychosociales du confinement de la population.  On sait aujourd’hui que tous les milieux n’ont pas été touchés de la même manière, et, de même, les conséquences du confinement ont été très différentes.

 

Isabelle Poirot-Mazères

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Directrice adjointe de l’IFERISS, elle est membre de l’Institut Maurice Hauriou et responsable du Master mention Droit de la santé et de la protection sociale.

Professeur de droit public, Isabelle Poirot-Mazères est également vice-présidente de l’Université Toulouse Capitole, en charge des relations avec la COMUE. Elle a coordonné l’ouvrage Santé, numérique et droit-s, LGDJ, juin 2018.




L'IFERISS en chiffres

13 laboratoires de recherche dont 7 sont rattachés à l’UT Capitole ou en multi-tutelle avec elle (le LaSSP, le CDA, l’IMH, l’IEJUC, l’IRDEIC, l’IRIT et l’IMT).

250 chercheurs, enseignants, post doctorants et doctorants.

700 publications, communications et conférences depuis 2009.

 


Symposium : la fabrique des inégalités sociales de santé

L’IFERISS organise, à Toulouse, le 27 novembre 2020 un symposium international sur « La fabrique des inégalités sociales de santé, passée au crible des sciences sociales », en association avec le Laboratoire d’études et de recherche en sociologie de Brest. Un sujet sensible : la France est, en la matière, un des pays les plus inégalitaires d’Europe occidentale.


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